Voilà au moins vingt ans que l’on entend sur toutes les ondes le constat de décès des communistes. Le moins qu’on ne puisse dire, c’est que le cadavre bouge encore.
Le Parti communiste français s’il est incontestablement bien moins puissant aujourd’hui que du temps des trente glorieuses, conserve de bons scores dans les mairies, conseils généraux, à l’Assemblée nationale, au Sénat et ce, contrairement au Front national qui n’a au mieux que dirigé quelques mairies temporairement et avec le succès que l’on sait (le scrutin proportionnel de 1986 leur a aussi donné un groupe parlementaire jusqu’en 1988). Raison pour laquelle le Front national a tant de mal (officiellement) a recueillir ses 500 signatures de parrainage à l'élection présidentielle.
Les Radicaux de gauche aussi me direz-vous ont une bonne représentation locale. Mais à la différence du PRG, la plupart du temps le PCF présente des candidats contre les socialistes ou leurs alliés. Leur survie est donc autonome et leur déclin d’ailleurs grandement lié à leur satellisation dans les gouvernements d’union de la gauche, y compris celui du tournant de la rigueur de 1983.
Cette dernière élection présidentielle de 2012 est la première depuis 1974 à ne pas voir de candidat du PCF se présenter. A l’époque le Programme commun avait décidé de présenter comme unique candidat François Mitterrand ce qui fait de ce scrutin un cas à part. Mais à la gauche du Parti socialiste les tendances ont toujours été multiples (les chiffres sont disponibles sur le site de france-politique) :
Les variétés de communistes comptent de rares dissidents comme l’ex-stalinien devenu rénovateur, Pierre Juquin dont l’échec en 1988 (1,7% des inscrits) enterra les ambitions. Surtout, comptés à l’extrême gauche parce que préférant le grand soir à la participation à un gouvernement bourgeois, les frères ennemis trotskistes n’en finissent pas d’étaler leur divisions.
Résultats à la gauche du PS depuis 1974 |
Les variétés de communistes comptent de rares dissidents comme l’ex-stalinien devenu rénovateur, Pierre Juquin dont l’échec en 1988 (1,7% des inscrits) enterra les ambitions. Surtout, comptés à l’extrême gauche parce que préférant le grand soir à la participation à un gouvernement bourgeois, les frères ennemis trotskistes n’en finissent pas d’étaler leur divisions.
Longtemps Arlette Laguiller, auréolée d’un combat syndical dur en 1974 dans le secteur bancaire, a été la plus visible de ses représentants. Lutte ouvrière, grâce à elle a fait une percée remarquée en 1995 et 2002 en rassemblant 4% des inscrits. C’est le seul mouvement trotskiste à présenter sans discontinuer des candidats depuis 1974. Traditionnellement son intransigeance amène le refus d’appeler à voter pour le candidat de gauche le mieux placé, et a fortiori quand il s’agit d’un candidat de droite : le second tour Jacques Chirac / Jean-Marie Le Pen en 2002 a été pour beaucoup dans la prise de conscience de son électorat d’une adhésion de Lutte ouvrière à la politique du pire, sensée créer les conditions d’une révolution. Nathalie Arthaud continue dans la ligne.
C’est suite à cette erreur politique que prend essor la Ligue communiste révolutionnaire , qui, revenue de l’humiliation d’Alain Krivine en 1974 (0,31% des inscrits) reprend des couleurs avec le très médiatique et habile Olivier Besancenot près de 30 ans plus tard. 2002 voit les orphelins de la gauche se disperser au mot d’ordre de Lionel Jospin, lui même ancien trotskiste lambertiste : « mon programme n’est pas socialiste ». C’est donc en toute logique que la gauche non gouvernementale remporte alors son plus beau succès : plus de 7% des inscrits. Besancenot se remplume encore la fois suivante et devient le premier représentant de la gauche de la gauche avec 3,4% des inscrits. Voulant transformer l’essai, la LCR cherche à fédérer l’ensemble de cette mouvance en créant le Nouveau Parti anti-capitaliste. Les divisions picrocholines reprennent le dessus après la polémique sur la présentation d’une femme voilée aux élections et Besancenot achève l’élan en refusant de se présenter en 2012, cédant la place au premier au concours de circonstance : Philippe Poutou. S’il conserve la première place à l’extrême gauche, il n’atteint pas 1% et tout semble à refaire.
Un mot sur les plus anecdotiques de la mouvance trotskiste. Des lambertistes de l’Organisation communiste internationale se présentent de temps à autre sous des noms divers (MPPT, PT, CNRD). Ils sont bien meilleurs dans l’entrisme qu’aux élections présidentielles où leurs candidats (Pierre Boussel dit Pierre Lambert, Daniel Gluckstein, Gérard Schivardi) ne décolle pas de 0,3% des inscrits.
Une mention aussi pour la gauche du PS qui avant Jean-Luc Mélenchon ne se fait pas vraiment remarquer : le Parti socialiste unifié représenté par Huguette Bouchardeau en 1981 (0,9%) et l’électron libre José Bové en 2007 (1,1%).
Restent donc les communistes partis en 1981 avec 12,2% des inscrits autour de Georges Marchais, ils en perdent la moitié après leur première expérience gouvernementale de la Ve République : 5,4% en 1988, 6,6% en 1995. Nouvelle participation au gouvernement et nouvelle chute de moitié : 2,9% en 2002 et 3,4% en 2007. Surtout, lors de ces deux scrutins, ils se font distancés par les candidats trotskistes : voilà le sang de Léon Trotski vengé dans les urnes ! Le PCF pâtit aussi bien sûr de la chute du mur de Berlin (1989) et de la dissolution de l’URSS (1991), l’espérance communiste y a perdu ses ailes internationales.
Leur ancien candidat (1995 et 2002) et Secrétaire général Robert Hue finit même par quitter le Parti et en vient à soutenir la candidature de François Hollande en 2012 dès le premier tour. C’est le bouillon de minuit.
Survient alors l’étonnant pari de Jean-Luc Mélenchon, ancien lambertiste lui aussi. Quittant le PS au cours du tragicomique Congrès de Reims en 2008, il décide de représenter l’aile gauche de celui-ci à l’extérieur du PS en créant le Parti de gauche. Réussissant à convaincre le PCF de ne pas prendre le risque d’un nouvel échec aux présidentielles, il réussit à s’en faire adouber en l’échange d’une surreprésentation du PCF aux législatives. La coalition qui prend le nom de Front de gauche agrège quelques autres petites formations et réussi là où le Nouveau Parti anti-capitaliste a échoué. Un temps donné dans les sondages à 17-18% des votants, il parvient à plus de 11%, mais seulement à 8,7% des inscrits. Il écrase tous ses compétiteurs de gauche, mais la gauche du PS reste dans l’étiage moyen qui est le sien depuis 1988, aux environ de 10% des inscrits. L’effet « vote utile » très fort à gauche depuis le traumatisme de 2002 ne lui a pas permis d’atteindre ses espérances. Pour l’instant, et l’avenir dira comment évolueront les choses, le vainqueur de l’expérience semble être le PCF qui ne devrait pas avoir trop de mal à préserver son groupe parlementaire à l’issue des législatives à venir. Je serais en tout cas surpris de leur participation au gouvernement.
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